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Passion vin et vie de famille : un équilibre possible ?

par | 19 Mai 2025 | 0 commentaires

Trop souvent confrontés à cette idée qu’il n’est pas possible de conjuguer passion du vin et vie de famille, nous vous proposons de mettre en lumière ceux qui y arrivent avec brio !

Je souris toujours quand j’entends (oui, avec mes 50 ans bien sonnés, j’ai un peu de recul) que travailler dans le monde du vin ou de la restauration serait incompatible avec une vie de famille épanouie. Alors, petit spoiler : les grasses matinées du week-end non plus ne font pas forcément bon ménage avec les enfants !

Que cache cette notion d’horaires décalés qui effraie tant ? Mes parents, infirmier et éducateur, ont élevé quatre enfants avec des plannings dignes de casse-têtes chinois. Si on cherche des métiers prenants, pensons aussi aux éleveurs ! Et pourtant, dans tous ces domaines, des familles se construisent, s’épanouissent et trouvent leur équilibre.

Nous avons donc décidé de partager avec vous ce dont nous sommes témoins tous les jours et de mettre en lumière ces passionnés du vin qui concilient avec talent leur métier et leur vie de famille. On vous emmène à la découverte de ces parcours inspirants ?

Le métier de Caviste en Famille

Le métier de caviste, que j’ai pratiqué quelques années, est un métier de commerce direct avec tout ce que cela implique : des heures creuses, très creuses, et des pics extrêmement hauts. Un caviste fait 30% de son CA annuel en un mois, en décembre. Comme tous les métiers de commerce, il faut adapter les horaires d’ouverture à ceux des consommateurs : une ouverture plutôt tardive tout comme la fermeture, 10 heures le matin à 19h, 19h30, voire 21h, tout dépend de votre quartier. Le samedi n’est pas négociable, le dimanche matin parfois.

Le vin a cela de magique qu’il lie la passion au savoir-faire. Et quand on est passionnée comme Charlotte Quiret, nous ne sommes pas étonnés de retrouver sa fille à ses côtés. Chez les Quiret, le vin est une histoire de famille. Charlotte a créé Vendanges Tardives avec le papa de Margaux il y a près de 20 ans. Bien que bercée par la magie du vin, Margaux ne se voyait pas reprendre la cave tout de suite. La peur que les clients pensent simplement qu’elle arrivait là par droit du sang. J’ai rencontré Margaux alors qu’elle souhaitait poursuivre des études dans le vin à la suite de son bac. Charlotte, en tant que maman, doit se sentir si heureuse de partager métier et passion avec sa fille unique. Une belle histoire.

J’ai pléthore d’exemples de cavistes parents. Aurélien avec qui je travaille souvent. Ce caviste (très) indépendant tient sa cave seul (les vins d’Aurélien), fait ses sélections de vins sans intermédiaire d’agent. Il est ouvert du lundi au samedi, propose des soirées dégustations deux fois par mois. Son crédo ? Être avec ses filles le mercredi matin et garder son lundi de repos. Cela lui permet de s’entourer d’autres indépendants qui le soutiennent sur cette journée et demie, ainsi que pendant ses vacances.

D’autres cavistes vont fermer des matinées de manière stratégique, le mercredi par exemple, afin de pouvoir s’occuper de leurs enfants, ou prendre des après-midi pour être avec eux. La plupart des cavistes que je connais ont aussi leurs activités liées à leur passion qu’ils pratiquent le soir. Beaucoup de ces activités sont liées à la musique ou à la nature. Dans le monde du vin, la musique occupe une place prépondérante. Charlotte pratique le piano, elle en a d’ailleurs installé un dans sa cave, ce qui lui permet de jouer lors des temps creux. Et puis rappelons le mes ces horaires permettent de prendre des RDV médicaux, administratifs etc

Au restaurant, le sommelier mais pas que

Je connais principalement des gérants, chefs, sommeliers, chefs de rang qui sont parents. Le Club Marot, avec qui je travaille très régulièrement, est entouré de nombreux enfants. Augustin Marot est l’un des quatre enfants de Clément Marot, chef historique et emblématique du lieu. Il a lui-même, avec son cousin Antoine, de jeunes enfants. Bien sûr, il serait malhonnête de vous dire que c’est facile, mais ils vivent les mêmes problèmes que n’importe quels parents. C’est toujours avec beaucoup de sourire qu’ils m’expliquent leur organisation quand ils doivent au dernier moment récupérer l’un d’eux, ou qu’il y a des malades, des transports à faire. Souvent, je croise ces petites filles tellement heureuses de venir manger avec maman et papa.

D’autres exemples où le couple au complet travaille au restaurant ne sont pas rares. J’ai très souvent vu des couples qui travaillent ensemble en restauration. Tout d’abord Octopus, situé place Sébastopol. Nicolas est un chef qui allie précision et cuisine intuitive, ce qui requiert une exigence de tous les instants. Stéphanie en service s’occupe du reste : la mise en place, le service lui-même, la comptabilité, l’administratif… Ils ont deux enfants que vous croiserez certainement si vous allez y manger. Le choix était simple : soit ils ne se voyaient pas, soit on bougeait les mentalités en permettant à ces deux petits mi-anges mi-démons de venir au restaurant pendant certains services – pas tous, mais ceux qui sont compatibles avec les rythmes scolaires.

Dans un autre restaurant lillois, le Dhaehan j’ai rencontré un couple sans famille pour les aider avec les enfants. Le mari fait les services du soir et son épouse ceux du midi, ainsi les enfants restent à la maison. Les jours de congés sont ceux de fermeture : dimanche-lundi. J’ai des dizaines d’autres exemples, il suffit de poser la question, nous sommes cerner de ces familles de restaurateurs et de cavistes

Vignerons et parents

Ces derniers temps, j’ai réalisé que dans le monde agricole, les deux métiers les plus prenants sont certainement éleveur et viticulteur. Là où la vigne vous permet quelques heures de répit le week-end, l’élevage ne le permet pas sans un investissement technologique important. Et bien souvent, les week-ends des vignerons sont dédiés à la vente de leurs vins sur les salons.

Ce qui distingue aussi les vignerons, c’est le rapport à l’œnotourisme : la capacité à se mettre à disposition des visiteurs, quelle que soit la situation qu’ils sont en train de vivre à la vigne ou au chai. Je ne connais pas de métier où l’on dédie autant son temps à l’autre. Les enfants et la famille sont pourtant là, toujours autour et dedans. La prochaine fois que vous visiterez un domaine, observez. Les enfants baignent dans le métier, ils s’imprègnent, et parfois reprennent le domaine plus tard.

Au Château Rol Valentin (vignobles Robin), sur Saint-Émilion, l’intensité du travail est telle qu’Alexandra et Nicolas ont une personne à temps plein avec eux pour les aider dans la gestion de la maison et des enfants (transport, école, activités). À trois, cela leur permet de pouvoir gérer les urgences et les accueils non prévus dans la journée.

Lors des premières mises en bouteille au domaine Terres de Grès sur Fresnicourt-le-Dolmen, c’est le fils aîné de Laurianne et Paul-Adrien qui était avec nous. Notre « malade imaginaire » n’avait pas pu aller à l’école – évidemment, ce qui se passait à la maison était bien plus excitant ! Il se voit déjà vigneron.

Alors que nous visitions le domaine Damien Laureau en Savennières – ils ont six enfants, cinq sont adultes et la dernière est encore en seconde – l’avant-dernière, en études de psychologie, est venue nous rejoindre. Les sourires et les échanges entre mère et fille montrent combien l’équilibre familial est présent. L’un des enfants a déjà décidé de poursuivre l’aventure quand les autres font des métiers tout autre.

Une capitalisation pour les générations qui nous suivront

Hier, je discutais avec Laurianne Carbonnaux, dont les mots résonnent profondément avec ce que beaucoup d’entre nous pourraient partager. Laurianne a quitté un poste salarié pour créer sa structure viticole en parallèle de l’exploitation agricole familiale. Elle a troqué ses 35 heures, ses congés payés et ses vacances régulières contre un métier de passion qui ne lui prend pas uniquement du temps physique, mais occupe aussi ses pensées en permanence – cette fameuse charge mentale.

Elle m’a confié avec un sourire : « Certes, je ne passe peut-être pas autant de temps libre avec mes enfants que certaines de mes amies, mais je capitalise pour les générations à venir, à commencer par mes propres enfants. » Cette perspective change tout, n’est-ce pas ?

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous ceux qui travaillent dans le monde du vin. Nombreux sont les employés qui trouvent leur équilibre différemment. Mais j’espère vous avoir démontré que même dans les cas les plus intenses, même lorsqu’on mise tout sur sa passion, ce qui nous unit au-delà du vin, c’est la transmission.

Que celle-ci prenne la forme d’une famille au sens strict ou au sens large – vos amis, vos clients qui deviennent vos amis – ne vous laissez pas freiner par la peur de perdre quelque chose. Il y a infiniment plus à gagner quand on suit ce qui nous fait vibrer. Le vin nous enseigne la patience, le travail au long cours, l’humilité face aux éléments… Des valeurs qui, finalement, ne sont pas si éloignées de celles qu’on cherche à transmettre à nos enfants. Qu’en pensez vous ?

 

Pour suivre et soutenir ces passionnés voici leurs comptes Instagram

Et il y en a bien d’autres à partager, n’hésitez pas à le faire.

  • @terresdegrès62150
  • @vignobles_robin
  • @domainelaureau
  • @clubmarot
  • @cave.vendangestardives
  • @cavistelille
  • @cave_la_vigneraie

 

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